
Division locale de Paris
du Tribunal de première instance de la Juridiction unifiée du brevet,
UPC_CFI_358/2023 Ordonnance de procédure rendue le 21/08/2024
DEMANDEUR
HEWLETT-PACKARD DEVELOPMENT COMPANY, L.P 10300 Energy Drive, Spring, Harris County, TX, 77389, USA - 77389 - Harris County - US
Représenté par Grégoire DESROUSSEAUX
DÉFENDEUR
LAMA FRANCE 241 Rue du Companet 69140 - Rillieux-la-Pape - FR
Représenté par Henri BOURGEOIS
BREVET LITIGIEUX
Numéro des brevets |
Titulaire |
EP2089230 |
HEWLETT-PACKARD DEVELOPMENT COMPANY, L.P |
EP1737669 |
HEWLETT-PACKARD DEVELOPMENT COMPANY, L.P |
JUGE QUI STATUE
Président et Juge-rapporteur
Camille Lignieres
LANGUE DE LA PROCEDURE : Français
ORDONNANCE
Faits et procédure
Une action en contrefaçon a été initiée par HEWLETT-PACKARD DEVELOPMENT COMPANY (ciaprès « HPDC ») à l'encontre de LAMA FRANCE (ci-après « LAMA») devant la Division locale de Paris en date du 11 octobre 2023.
Le 2 août 2024, LAMA a déposé une demande d'irrecevabilité enregistrée dans le CMS sous le n° 44722/2024 concernant le mémoire déposé par HPDC le 15 juillet 2024 intitulé « mémoire en duplique au mémoire en réplique, mémoire en réplique au mémoire en défense à une demande de modification du brevet ».
Le juge-rapporteur a invité HPDC à produire ses observations écrites sur cette demande dans un délai de 14 jours, soit au 16 août 2024, ce qui a été fait par email du 15 août 2024 avec toutes les parties en copie, du fait de difficultés techniques pour l'enregistrer à cette date dans le CMS.
LAMA sollicite dans sa requête procédurale de déclarer irrecevable dans le mémoire en duplique au mémoire en réplique d'HPDC déposé le 15 juillet 2024 devant la JUB l'intégralité du contenu des sections suivantes :
-
- REMARQUES PREALABLES POUR LA CONFERENCE DE MISE EN ETAT (section 1)
-
- LES QUESTIONS PREJUDICIELLES ET JURIDIQUES (section 2)
-
- LA COMPETENCE DE LA JUB POUR CONNAITRE DE FAITS ANTERIEURS A SON ENTREE EN VIGUEUR ET LE FONDEMENT APPLICABLE (section 2.1)
-
- LA COMPETENCE DE LA JUB POUR STATUER SUR DES QUESTIONS DE DROIT DE LA CONCURRENCE (section 2.2)
-
- L'EPUISEMENT DES DROITS (section 2.3)
-
- LA MISE EN CONNAISSANCE DE CAUSE (section 2.4)
-
- LA CONTREFAÇON (section 4)
-
- LES ACTES DE CONTREFAÇON (section 4.1)
-
- LES PREUVES (section 4.2 : L'appréciation des preuves ; L'appréciation des preuves portant sur la contrefaçon des clones ; L'appréciation des preuves portant sur la contrefaçon des cartouches IPNA ; Le rapport CSIC ; L'attestation de HPDC ; Les tests de compatibilité)
-
- LA DEMANDE D'INFORMATIONS (section 5)
-
- LA CONFIRMATION DES DEMANDES DE HPDC (section 6)
-
- LISTE DES DOCUMENTS (section 7).
-
- et d'écarter purement et simplement des débats tous les développements d'HPDC relatifs aux sections ci-avant exposées, ainsi que toutes les pièces d'HPDC n°85 à 99 et 101 à 101bis, et les jurisprudences JP19 à JP23 afférentes à ces développements.
Au soutien de sa demande, LAMA fait valoir qu'en appliquant les règles 12 et 29 e) du Règlement de procédure (RdP), et en respectant les grandes phases de la procédure écrite de première instance prévues par les textes devant la JUB, HPDC ne pouvait pas répondre sur les points ayant trait à l'action en contrefaçon, ni produire, sans justification, des pièces et jurisprudences relatives aux actes de contrefaçon.
En réponse, HPDC sollicite le rejet de la demande de LAMA, et subsidiairement demande au juge rapporteur de rejeter la pièce n°49 de LAMA et l'ensemble des arguments qui s'appuient sur cette preuve pour retenir que LAMA n'aurait pas la qualité de fabricant.
Au soutien de sa demande de rejet, HPDC fait valoir qu'elle n'a répondu qu'aux nouveaux arguments soulevés par LAMA dans son dernier mémoire du 15 juin 2024 pour y apporter les clarifications nécessaires à la bonne compréhension du litige par la JUB mais n'a formulé aucun argument nouveau. HPDC ajoute que dans son mémoire du 15 juin 2024 LAMA n'a pas fait que répondre aux éléments présents dans la réponse de HPDC, que LAMA n'a pas hésité à apporter des éléments nouveaux et des preuves qui auraient pu être communiquées plus tôt ayant des répercussions sur plusieurs de ses arguments. HDPC en conclut que si le juge rapporteur venait à écarter les éléments de réponse requis par LAMA, alors certains éléments et en particulier la pièce n°49 de LAMA, devraient eux aussi être écartés, à défaut cela priverait HPDC de l'opportunité de répondre et de se défendre.
HPDC fait également valoir qu'une interprétation plus souple de la procédure devrait être adoptée par le juge rapporteur pour une décision de qualité comme le requièrent les textes et notamment les principes du préambule du Règlement de procédure aux points 2, 4 et 5 et conformément à l'AJUB dans ses articles 41, 42, 52 et 76.2 qui doivent prévaloir sur les règles de procédure, notamment sur la règle 29 e).
Cadre légal
R 12 RdP - Échange de mémoires (action en contrefaçon) :
-
« 1. La procédure écrite comprend :
-
a) le dépôt d'un mémoire en demande (par le demandeur) [règle 13] ;
-
b) le dépôt d'un mémoire en défense (par le défendeur) [règles 23 et 24] ; et, facultativement
-
c) le dépôt d'un mémoire en réplique au mémoire en défense (par le demandeur) [règle 29, point b)] ;
-
et d) le dépôt d'un mémoire en duplique au mémoire en réplique (par le défendeur) [règle 29, point c)].
-
- Le mémoire en défense peut inclure une demande reconventionnelle en nullité [règle 25, § 1].
-
- Si une demande reconventionnelle en nullité est formée :
-
a) le demandeur et tout titulaire qui devient partie en vertu de la règle 25, § 2 (ci-après dans cette règle 12 et les règles 29 à 32, « le titulaire ») dépose un mémoire en défense à la demande reconventionnelle en nullité [règle 29, point a)], qui peut inclure une demande de modification du brevet par le titulaire [règle 30] ;
-
b) le défendeur peut déposer un mémoire en réplique au mémoire en défense à la demande reconventionnelle [règle 29, point d)] ; et
-
c) le demandeur et le titulaire peuvent déposer un mémoire en duplique au mémoire en réplique au mémoire en défense à la demande reconventionnelle [règle 29, point e)].
-
- Si une demande de modification du brevet est déposée par le titulaire, le défendeur dépose un mémoire en défense à la demande de modification du brevet dans le mémoire en réplique au mémoire en défense à la demande reconventionnelle, le titulaire peut déposer un mémoire en réplique au mémoire en défense à la demande de modification et le défendeur peut déposer un mémoire en duplique à ce mémoire en réplique [règle 32].
-
- Le juge-rapporteur peut autoriser l'échange d'autres mémoires dans des délais qu'il précise [règle 36] ».
R 29 RdP - Dépôt d'un mémoire en défense à la demande reconventionnelle en nullité, d'un mémoire en réplique au mémoire en défense et d'un mémoire en duplique au mémoire en réplique :
- e) Dans un délai d'un mois à compter de la signification du mémoire en réplique au mémoire en défense à la demande reconventionnelle, le demandeur peut déposer un mémoire en duplique au mémoire en réplique avec tout mémoire en réplique au mémoire en défense à une demande de modification du brevet, en vertu de la règle 32, si elle s'applique. Le mémoire en duplique au mémoire en réplique au mémoire en défense se limite à une réponse aux questions soulevées dans le mémoire en réplique au mémoire en défense.
R 32 RdP : Dépôt du mémoire en défense à la demande de modification du brevet, du mémoire en réplique au mémoire en défense et du mémoire en duplique au mémoire en réplique :
-
- Le titulaire peut déposer un mémoire en réplique au mémoire en défense à la demande de modification du brevet dans un délai d'un mois à compter de la signification du mémoire en défense et le défendeur peut déposer un mémoire en duplique au mémoire en réplique dans un délai d'un mois à compter de la signification du mémoire en réplique. Le mémoire en duplique se limite aux questions soulevées dans le mémoire en réplique. »
Motifs de l'ordonnance
Il ressort de R 12 RdP que le règlement de procédure a divisé la procédure écrite en plusieurs étapes successives :
-
- une étape 1 ou flux 1 (« workflow » 1 en anglais) relative à la demande en contrefaçon elle-même comprenant un jeu de 4 écritures,
-
- puis, un flux 2 d'écritures dédié à la validité du brevet en cas de demande reconventionnelle en nullité du brevet en cause,
-
- enfin, un flux 3 particulièrement dédié à la modification du brevet en cause si elle est demandée.
Dans le flux 1, le défendeur à la demande en contrefaçon a le dernier mot, en l'espèce LAMA.
Dans le flux 2, le défendeur à l'attaque sur la validité du brevet en question a le dernier mot, en l'espèce HPDC.
Enfin, pour le flux 3 en cas de demande de modification du brevet en cause, le défendeur à cette demande a le dernier mot, soit en l'espèce LAMA.
Ces flux, assortis de délais stricts, ont été prévus pour assurer une procédure la plus efficace et la plus économique qui soit devant la JUB, conformément au point 4 du préambule.
Afin que les principes de flexibilité et de souplesse ainsi que le principe général de justice et d'équité prévus au point 2 du préambule soient respectés, R 36 RdP permet aux parties de demander des écritures supplémentaires au juge rapporteur sur demande motivée.
En outre, R 29 (e) indique expressément que le « mémoire en duplique au mémoire en réplique au mémoire en défense se limite à une réponse aux questions soulevées dans le mémoire en réplique au mémoire en défense ».
En l'espèce, dans son mémoire du 15 juillet 2024 qui intervient dans le cadre des flux 2 et 3 de la procédure écrite, HPDC devait se limiter à répondre aux points 3 et 4 dédiés à la validité du brevet (y compris la modification proposée) développés dans le mémoire du 15 juin 2024 par LAMA, et si HPDC considérait que des moyens nouveaux sur la demande en contrefaçon justifiaient un échange supplémentaire, il lui appartenait de le demander au juge rapporteur par une requête motivée sur R 36 RdP.
La Cour relève que seul le point 3 du mémoire de HPDC du 15 juillet 2024 traite de la validité des brevets en cause (pages 25 à 41) c'est à dire le sujet concerné par les flux 2 et 3.
En effet, le point 1 du mémoire en question est dédié à la préparation de la conférence de mise en état, or, ce sujet fera l'objet d'une information préalable aux parties par le juge rapporteur après le 30 août prochain, date annoncée de la clôture de la procédure écrite et la question de l'audition de témoin à l'audience orale va être traitée dans les jours qui suivent en parallèle, dans le cadre de la demande procédurale distincte soumise au juge rapporteur le 15 juillet 2024 par HPDC.
Le point 2 concerne les questions de compétence qui ont déjà été exposées dans les mémoires précédents du demandeur.
Le point 4 relève de la contrefaçon elle-même, c'est-à-dire devant être traité dans les échanges du flux 1, sauf requête motivée sur R 36 RdP.
Le point 5 sur la demande d'information a été traité en parallèle dans le cadre d'une demande procédurale distincte sur R 191 RdP par une ordonnance du juge rapporteur du 2 août 2024.
Quant aux points 6 et 7 concernant la confirmation des demandes et la liste des documents, ce n'est qu'un rappel des développements déjà exposés dans les mémoires antérieurs déposés par HPDC.
Concernant l'argument de HPDC faisant valoir que ses développements sur l'action en contrefaçon permettent seulement une clarification de ses arguments pour aider la Cour à rendre une décision de meilleure qualité :
En l'espèce, même si les écritures des deux parties sont présentées clairement grâce à une table des matières précise et une présentation ordonnée des arguments, la répétition intégrale des arguments est superflue (un renvoi explicite en désignant les parties pertinentes dans les mémoires précédents suffirait) et cette répétition tend à un surplus du nombre de pages des écritures (à ce jour plus de 1760 pages pour l'ensemble des seuls mémoires au fond déposés dans cette affaire) qui n'aide pas les juges à rendre une décision de meilleure qualité telle que prévue au point 6 du préambule du Règlement de procédure, contrairement à ce que prétend HPDC dans sa réponse du 16 août 2024.
Concernant l'argumentation de HPDC relative à la réponse à un argument nouveau présenté par LAMA dans son mémoire du 15 juin 2024 :
Tout d'abord, il est logique que LAMA réponde à l'allégation de HPDC concernant son rôle de fabricant des produits allégués de contrefaçon car il est défendeur à l'action en contrefaçon. En outre, la critique consistant à dire que la pièce 49 (attestation de son expert-comptable sur l'activité de LAMA) a été produite tardivement et que cela est contraire au principe de la contradiction n'est pas pertinente en ce que ladite pièce et les explications afférentes ont amené HPDC à soumettre une demande procédurale d'information sur R 191 RdP le 2 août 2024. Dans le cadre de cette demande procédurale, LAMA a produit dans sa réponse de nouvelles pièces informant sur l'activité et le statut de ses deux filiales et la question de leur rôle respectif dans la fabrication des cartouches alléguées de contrefaçon, et la demande de HPDC sur R 191 RdP a été partiellement accueillie par le juge rapporteur en enjoignant LAMA à produire certaines pièces demandées par HDPC concernant le rôle de LAMA dans les actes de contrefaçon qui lui sont reprochés. Il n'y a donc pas lieu d'écarter la pièce 49 de LAMA et les explications concernant cette pièce, le principe de la contradiction ayant été respecté à l'égard de HPDC.
Au vu de ces éléments, il convient de faire droit à la demande tendant à la mise hors des débats des éléments suivants comme inadmissibles sur le fondement de R 29 e) dans le mémoire soumis par HPDC le 15 juillet 2024, soit :
-
- tous les développements hors ceux du point 3 et les pièces 85 à 101 bis de HPDC afférentes au point 3.
Subséquemment, comme cela a été admis par LAMA (page 19 de son mémoire du 16 août 2024 qui indique avoir répondu « à titre conservatoire » à l'ensemble du mémoire du 15 juillet 2024), il est logique, du fait de la mise hors des débats d'une partie du mémoire de HPDC du 15 juillet 2024, que ne soient admises aux débats dans le mémoire du 16 août 2024 soumis par LAMA que les réponses au point 3 du mémoire de HPDC.
Par conséquent, pour les mêmes raisons d'inadmissibilité sur le fondement de R 32.3 RdP qui indique que « le mémoire en duplique se limite aux questions soulevées dans le mémoire en réplique », LAMA devait limiter sa réponse dans son mémoire du 16 août 2024 à la question de la validité de la forme modifiée du brevet telle que proposée par HPDC. Seront donc mis hors débats tous les développements autres que ceux des points 3 et 4 ainsi que les pièces relatives à ces points, soit les nouvelles pièces 59 à 64 de LAMA.
Par ces motifs,
Le Juge-rapporteur ordonne la mise hors des débats, en les disant inadmissibles sur le fondement des règles 12, 29 (e) et 32.3 du RdP, des éléments suivants :
-dans le mémoire soumis par HEWLETT-PACKARD DEVELOPMENT COMPANY le 15 juillet 2024 :
-
- tous les développements hormis ceux du point 3, ainsi que les pièces d'HPDC n°85 à 99 et 101 à 101bis et les jurisprudences JP19 à JP23 afférentes au point 3 ;
-dans le mémoire soumis par LAMA France le 16 août 2024 :
-
- tous les développements hormis ceux des points 3 et 4, ainsi que les pièces afférentes à ces points, soit les nouvelles pièces 59 à 64 de LAMA.
Cette ordonnance est susceptible d'une révision par la chambre selon les conditions de la règle 333 du RdP.
Rendue à Paris, le 21 août 2024.
Camille Lignières, juge-rapporteur
DETAILS DE L'ORDONNANCE
Ordonnance nº ORD_47694/2024 dans l'ACTION Nº: ACT_578697/2023 UPC nº : UPC_CFI_358/2023 Type d'action : Action en contrefaçon Demande procédurale dans Application n° 44722/2024